Poems

EVIDENCE :

Foncer comme un bolide dans une nuit de mercure,
Lâcher sa vie et rire de tout, de rien, délire.
On ne vit que sept fois, alors profitons-en.
Rien ne peut m'arrêter, je vais droit dans le mur,
En souriant encore de te voir me sourire.
Ne peux-tu ressentir la coque qui se fend ?
C'est mon bateau qui coule, la cuirasse qui retombe,
Et l'évidence enfin m'éclate comme une bombe.

VOILE :

J'ai vu venir sur l'océan la flamme blanche,
Elle dansait sur les crêtes comme le font les mouettes.
Intrigué par sa forme, barre calée sur ma hanche,
J'ai dû changer de cap, et border la trinquette.

Je me suis approché, louvoyant dans la houle,
Gagnant bord après bord, sur cette étrange toile.
Le navire mystérieux, poussé par cette voile,
Gardait ferme sa route sur une mer saoule.

Et plus je m'approchais, et plus je discernais,
Les détails qui d'abord, me paraissaient étranges,
Devenaient familiers, et ce gréement aux franges
Elimées par le vent, me revint d'un seul trait.

C'était un brick ancien, mâtiné goélette,
Vieux bien de deux cents ans, mais la mâture nette.
Ces lignes arrondies, surmontées de squelettes,
Trahissaient un flamand. Mais où ai-je la tête ?

Sur le tableau de poupe, où pendait là encore
Un tibia décharné, brillait en lettres d'or,
Paix à mon âme, deux mots anglais, "Flying Dutchman"…

A celle que j'attends… le temps qu'il faut.

Quand tu passes près de moi, mon cœur,
Le mien manquerait presque un temps.
Le parfum de ta peau me prend,
Tes cheveux reviennent et m'effleurent.

Ta vie de bohème m'attire,
Et j'envie si souvent ton fou rire,
Qu'il y a des jours où je sais
Que, pour toi, tout je laisserais.

Tu sens si bon la liberté !
Tu fleures tant la joie de vivre !
Quand tu décideras de m'aimer,
Je saurai bien alors te suivre.

Je t'offrirai les fleurs et le vent,
Toutes les senteurs d'Orient,
L'or ou la myrte et puis l'encens.
Car ton amour n'a pas de prix,
Désirable comme la nuit,
Les étoiles et le Paradis.

Un soir de promenade, dans le jardin d'Eden,
J'ai trébuché sur ton sourire.
La ville a soudain paru dire :
"Ne laisse pas passer ma perle, c'est ta reine".

Rêve de marin…

Laisse tomber cette neige, mon cœur,
Ne prends pas cette peine.
Laisse le temps réagir dans tes veines.
N'enferme pas tes humeurs.

Libères la bête qui sommeille en toi.
Largue toi les amarres !
Lâche le fauve tapi et pars,
Ou te pousse ta voie.

Tes voiles d'argent tendront vers l'azur.
Ton étrave effilée
Pourra fendre le flot vert à mesure
De la brise d'été.

La brume monte sur la mer :
Le bateau s'est posé sur sa cale.
Mais mon cœur bat plus fort et se serre,
Car tu t'es couché sous la voile.

DESPERADOS :
Hommage à Luis Sepulveda…

Ils étaient deux chevauchant dans la plaine,
Deux gringos aux traits tirés, fatigués.
Ils n'étaient plus tout jeunes et leur haleine,
Figée par le froid, partait en buée.

Ils étaient deux et leurs chevaux dociles
Crevaient la pampa à travers les joncs.
Une larme de glace, pendue à un cil,
Le plus grand resserrait ses éperons.

Plus loin derrière eux, dans le ciel chilien,
Un petit nuage de poussière grandit.
Les banquiers voudraient bien s'asseoir enfin,
Sur leur magot pourtant bien mal acquis.

Les gringos font halte, mettent pied à terre
Et couchent dans l'herbe leurs deux Winchesters.
Dans quelques heures, ces soldats seront fiers
D'avoir mis Cassidy et Kid à terre…

WOLFPACK :

Le vent s'engouffre entre les arbres
Et siffle de froid essoufflé.
La neige tombe par paquets,
Des branches sur le sol gelé.

A l'ombre grise des grands mélèzes,
Une masse sombre se profile,
Ondule et vibre, se défile,
En bondissant vers la falaise.

Un, trois, cinq ou dix grands loup gris,
Dans la pénombre verglacée,
Lancent ensemble ce long cri,
Qui fait frissonner l'égaré.

Pries pour ton âme, voyageur,
Car le pack est bien sur ta trace.
La meute suit déjà ton odeur,
De peur et de sueur sur ta face…

DISTANCES RELATIVES :

Comme une flèche bleue, lancée dans la nuit moite,
Mon train suit sa cadence, projectile électrique.
Et moi dans ce bolide, blindé de céramique,
Je m'éloigne de toi et mon cerveau déboîte !

C'est que mon cœur se serre, même si ma raison sait,
Qu'un autre train d'azur, à la même vitesse,
T'emmèneras vers moi, vers la mer et sans cesse,
Je me dis que peut-être ton cœur aussi le sait !

Quitté sans laisser d’adresse.

Je ne suis pas parti,
C’est elle qui m’a quitté sans me laisser d’adresse.
Comme toutes les autres, d’un mois ou d’une nuit
D’une semaine ou de tant d’années.

Je suis seul dans mon lit,
C’est elle qui m’a quitté, comme les autres traîtresses,
Sans même dire pourquoi, et puis d’ailleurs tant pis.
Autant m’en rire au nez.

MOUETTE VOYAGEUSE

De Venise à Mantoue, de Florence à Padoue,
La mouette effleure les crêtes, avale les kilomètres.
De Paris à Moscou, en passant par Capoue,
La princesse voyage sur les routes où les reîtres,
Jadis faisaient la bourse des pauvres voyageurs.
Parfois, hélas aussi, ils leur perçaient le coeur...

Aujourd'hui, de leurs casques ou de leurs fiers plumets,
Ne restent que des traces, rangées dans les musées,
Que la mouette rigolote dédaigne visiter,
Préférant les chemins, les haies de chêvrefeuilles
Ou ces jeunes conquérants culbutaient les traînées,
Ramassées dans l'auberge où elles faisaient de l'oeil.

Mais la mouette rieuse ne rêve que d'horizons,
Où les nefs modernes tranchent de leurs fumées
La splendeur d'un soir où, le soleil couché,
Dans un embrasement toute la lumière fond.

MOUETTE FLAMBEUSE

La mouette flambeuse flambe des deux ailes
En torche valse vers l'océan.
Princesse blanche et si belle,
La mouette rieuse plonge dans le néant.

AUTOUR D'UNE TASSE DE CYBERCAFE :

Vapeur légère et parfumée,
Monte en hélices légères,
Au dessus de ma tasse claire,
Du disque noir de mes idées.

Miroir noir de sombre velours,
Reflet tournoyant et sucré,
Odeurs de lieux ensoleillés,
Me ramènent enfin au jour.

Et tandis que je réalise
Que c'est là ton image instable
Sur ces moirés ocres et sable
Qui apparaît et se précise,

Je ne peux m'empêcher de croire,
Que toi aussi, ma belle amie,
Tu t'apprêterais à boire,
Ce noir calice jusqu'à la lie…

THE END

I'm going along the river
Bleeding from all my wounds
Running away, despite the sounds
Telling me to bail in the water.

I'd like to forget you my tender,
I'd like to tell you the truth :
You won't ever find a mouth
To tell you all my deep despair.

It is the end, my dear friend,
It is the end of my happiness.
My heart is now restless,
As for us both it is the end.
(7-08-1998)

Suite pour violoncelle.

Un damier de carreaux noircis
Une pelote de ficelle
C'est une mélodie enfuie
Une suite pour violoncelle.

La pelote roule et puis s'emmêle
Devient nuage de lacets
La musique enfle et se transmet
Aux murs crépis qui se descellent.

Les violons crèvent, les murs se fendent
Et la musique ici s'achève
Les murs retombent sur mon rêve
Tandis que mes bras se tendent...

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